You are currently viewing L’éducation bienveillante est-elle devenue une nouvelle norme?
Source: Pixabay

L’éducation bienveillante est-elle devenue une nouvelle norme?

Avant d’être maman, je ne m’étais jamais intéressée au maternage proximal, au cododo, à l’allaitement. Depuis la naissance de Kate, en revanche, c’est une autre histoire: Kate est un bébé koala. Kate a un besoin intense d’être maternée. Kate a besoin de la chaleur du sein pour se sentir rassurée et s’endormir.

Depuis le tout début, je m’adapte à elle, du mieux que je le peux: elle et moi,  on co-dodote, je la garde dans les bras toute la journée, je l’allaite à la demande, et je ne la laisse presque jamais pleurer. A la recherche d’informations pour essayer de m’améliorer, de ne pas faire trop de conneries, je lis un peu tout ce qui me tombe sous la main. Et, forcément, je lis énormément d’articles, de livres (Filliozat power), et de blogs qui traitent de l’éducation bienveillante. Ne pas laisser pleurer bébé, s’adapter à ses besoins au quotidien, ne pas punir, ramener Montessori et toutes ses belles idées à la maison et dans la cour de l’école…

Tu vas me dire « attends, tu nous parlais de maternage proximal en tout début d’article ». Eh bien oui, mais en fait, tout ceci (Montessori, le maternage, l’éducation bienveillante, et j’oublie sans doute d’autres notions dans le lot) forment un tout, et en général (même s’il y’a sans doute des exceptions), en général donc, quand tu pratiques l’un, tu pratiques l’autre. En tout cas, je n’ai encore jamais entendu personne me dire envoyer son gamin à l’école militaire après l’avoir materné sur fond de Montessori les premières années. Il y’a sans doute des exceptions, hein. J’en connais qui ne jurent que par le bio mais qui ne peuvent pas se passer de Nutella. 😉

Et puis, à force de lire tout ça, je finis par tiquer: « il faut », « il ne faut pas », vous devez », « si vous ne faites pas ça, votre bébé souffrira plus tard de graves carences affectives ». Vous pensez que j’exagère? Oui, mais à peine, en fait. Et c’est bien là où le bât blesse: moi qui pensais découvrir un monde merveilleux fait d’écoute, d’empathie, de bienveillance et de douceur, je me retrouve parachutée dans un univers où les « il faut laisser bébé pleurer sinon il va te tyranniser » sont devenus des « il ne faut pas laisser bébé pleurer, sinon plus tard il sera serial killer ». Pol Pot ou Guy George, choisis ton camp, jeune parent!

Je plaisante, mais je m’interroge (j’aime bien m’interroger, tu l’auras compris si tu me lis régulièrement). Pourquoi toute cette agressivité envers les autres jeunes parents, pourquoi vouloir à tout prix les convertir à son propre mode d’éducation? Pourquoi partir du principe que, si d’autres parents ne font pas exactement ce que tu as fait toi, pour ton propre enfant, alors ce sont forcément de très mauvais parents? Et, surtout, surtout: comment enseigner la bienveillance à ton gamin quand tu en manques cruellement toi-même face à tes congénères?

Alors oui, je sais: quand tu entends parler d’autres méthodes d’éducation que la tienne, c’est irrationnel, mais tu te sens forcément remis(e) en question; il est rare et compliqué de ne pas entendre « tu t’es planté dans l’éducation de ton enfant » quand tu es confronté à un autre parent qui t’explique (sans doute sans aucune arrière pensée) laisser un peu pleurer son bébé (ou beaucoup, hein, chacun a méthode).

Mais quand même: est-ce que l’éducation bienveillante, celle qui fait la une des magazines et des sites destinés aux jeunes parents, n’est-elle pas en passe de devenir une nouvelle norme d’éducation extrêmement rigide? Tout comme les « il faut laisser pleurer bébé, comme ça il fera ses poumons » ont guidé nos propres parents dans leur temps? Je constate d’ailleurs, en discutant avec des personnes de la génération de mes propres parents, des « diktats » qu’eux-mêmes se sont efforcés de suivre, pour être de bons parents. Parce que oui, il fut une époque où on considérait que donner le sein, c’était mal, c’était s’asservir à son bébé, et que la vraie, la seule solution, c’était de donner le biberon.  Oui, il y’a encore quelques années, on pensait qu’un nourrisson de quelques semaines était capable de faire un caprice (on sait aujourd’hui grâce aux neuro sciences que le cerveau du nourrisson n’est pas « câblé » pour ça).

Donc tout ceci m’agace, mais m’agace… et si, au final, on essayait de s’adapter à son bébé, plutôt que de se cacher derrière de nouvelles normes qui n’ont de bienveillantes que le nom? Et si on arrêtait de vouloir à tout prix faire culpabiliser l’autre jeune parent à mort, parce qu’il suit son propre chemin d’éducation?

Dans le fond, nous faisons tous de notre mieux. Je ne pensais pas faire de cododo, je me lamente régulièrement sur le fait de devoir en faire encore avec Kate: je sais que certains parents m’applaudiront, là où d’autres seront prêts à appeler la police psychanalytique immédiatement pour me faire enfermer séance tenante. Je ne fais qu’essayer d’accompagner mon bébé: je me fiche comme de ma première culotte de savoir si untel ou bidule fait du cododo aussi. Ce qui m’intéresse, à la rigueur, c’est de questionner les autres parents pour leur demander des conseils. Pas de les juger. Et j’apprécie quand je peux lire un livre, un article, ou un blog qui donnent des conseils sur le cododo en toute sécurité sans donner l’impression désagréable de juger ceux qui ne font pas ce choix-là pour leur bébé. Les « mauvais parents ». Et je trouve cela d’autant plus hypocrite de s’ériger en apôtre d’une éducation respectueuse des besoins de l’enfant, aimante, ouverte et tolérante, quand on est pas fichu de s’abstenir de rédiger un article sans mépriser l’autre.

Mais tout le monde n’est pas comme ça, je fais d’ailleurs partie d’une communauté de jeunes mamans où, malgré toutes nos différences, nous arrivons à nous parler, à nous écouter, à nous soutenir, sans donner la sensation de juger l’autre (en tout cas, moi qui en chie en ce moment la nuit avec Kate, je n’ai jamais eu la sensation d’être méprisée ou jugée parce que j’allaite encore, ou parce que je dors à côté de ma fille) (mais Kate, sinon, c’est quand tu veux pour dormir dans ton lit acheté avec amour par papa). Si ces filles n’existaient pas, je pense que j’aurais renié toute envie de rentrer en contact avec d’autres parents. Internet n’est pas qu’une zone de non-droit parental, fort heureusement.

Bref: un peu de bienveillance, bordel de crotte. Etre parent est déjà tellement difficile…

 

Cet article a 30 commentaires

  1. Die Franzoesin

    Oh mais dis je fais partie des filles dont tu parles…? Si c’est le cas c’est gentil 🙂 . En fait moi j’ai l’impression de naviguer dans une blogosphère plutôt bienveillante mais c’est sans doute parce que je me contente d’une petite liste de lecture bien connue.

    1. Urbanie

      Oui, globalement c’est ce que je fais aussi, j’essaie de choisir mes lectures avec soin. Mais il m’est déjà arrivé d’avoir le malheur de taper « cododo » ou « allaitement » dans la barre de recherche de mon moteur de navigation après des nuits un peu compliquées, et être tombée sur du très bon… et du très moins bon!

  2. Chat-mille

    Je t’avoue qu’il m’arrive d’avoir des cas de conscience en recevant des articles qui remettent en cause partiellement ou totalement l’éducation bienveillante. Mon avis sur la question, à la limite, on s’en fout. Je vais pas empêcher les gens qui votent à droite de s’exprimer parce que je vote à gauche (et je suis assez satisfaite des résultats dans ma région, youhou, bref). Ce que je me demande, c’est si les publier, ce n’est pas un peu comme publier un article qui s’appellerait « Je frappe mes enfants, ça leur apprend la vie »… Ce serait choquant, non ? Pourtant, dans les années 50, cette position était la norme et n’avait rien de choquant. Ça me semble un peu pareil pour l’éducation « à la dure » : une norme d’hier qui n’a pas nécessairement sa place dans le paysage éducatif d’aujourd’hui. C’est une chose d’avoir des amis qui le font, c’en est une autre d’offrir en tribune pour ces voix.

    Et je crois que cette réflexion rejoint un peu ton article. On est (presque) tous d’accord pour dire : « Il ne faut pas frapper les enfants » (du moins, je pense). Preuve qu’il y a quand même des choses bien et des choses mal en matière d’éducation, que tout n’est pas qu’histoire de choix tous respectables. A quel moment on bascule du jugement de valeur à la valeur intrinsèque d’un principe éducatif ? Il n’y a pas forcément de limite palpable. Pour moi, c’est vraiment, avant tout, une question d’évolution des mentalités.

    Je ne blâme pas les gens qui laissent pleurer leurs enfants (tout comme je ne blâme pas les gens qui mangent de la viande). Mais je pense à titre personnel que ce n’est pas ce qu’il faut (pour le coup, j’emploie le verbe « falloir ») faire. C’est ma conviction, et ça ne sert à rien d’avoir une conviction si on pense que tout se vaut, n’est-ce pas ? C’est pour ça que je ne suis pas d’accord avec toi quand tu parles d’effet de mode (pas dans cet article, mais ailleurs) et que je ne suis pas vraiment d’accord avec le fond de ton article.

    Bienveillance et tolérance power, ça on est d’accord. On fait tous comme on peut, avec le caractère qu’on a, les informations qu’on possède, les valeurs qui nous animent. Jamais je n’irais cracher sur quelqu’un parce qu’il fait différemment de moi. Ça ne m’empêche pas de penser que ma façon de faire est meilleure… et heureusement, sinon pourquoi je me casserais les pieds à faire comme ça ? 🙂

    (ah, et pour en revenir au début : ces articles, je m’interroge, mais je les publie quand même… ce qui doit vouloir dire que je pense que ce sont des choses qu’on peut encore entendre à notre époque… est-ce que ce sera toujours le cas dans 50 ans ? honnêtement, je ne pense pas)

    1. Chat-mille

      (en fait ce que j’essaie – difficilement – de dire, c’est que je suis tout à fait d’accord pour laisser parler les gens qui pensent autrement, ne pas les démonter, et même les laisser faire comme ils veulent tant que leur comportement ne relève pas de la maltraitance, mais que moi quand je parle, je dis « il faut » et « les études prouvent que », parce que je considère que c’est vrai… et après tout, si on ne veut pas m’écouter, on n’est pas obligé de me lire ;))

    2. Urbanie

      Je comprends ton point de vue, je me doutais que tu ne serais pas complètement d’accord! 😀
      En fait je ne reproche pas à ces gens d’avoir un point de vue affirmé; je leur reproche d’essayer de convaincre les autres parents de faire comme eux par une culpabilisation intensive. Je leur reproche surtout d’avoir édicté des normes extrêmement rigides qui rendent leur postulat de départ (la bienveillance) complètement caduque. En gros, je ne retrouve pas vraiment de bienveillance là dedans, au contraire, et c’est bien ça qui me chiffonne.
      Le pire, c’est que je suis globalement d’accord avec eux sur le fond, mais je conteste la forme employée.

  3. Madame D

    Que c’est beau ce que tu nous dit la !! Et j’espère qu’il touchera beaucoup de parents !!!!
    Chaqu’un fait comme il peux.
    Et c’est vrai qu’avec ce qu’on trouve sur les dictac de l’éducation on ne sait jamais si on fait bien. Ici on est dans la phase « terrible Two ». Et je ne sais jamai si je fait bien. Est ce que je ne crie pas trop ? Est ce que je la punit trop ? Ou au contraire est ce que je ne suis pas assez ferme ?
    Comme toi avec le cododo j’ai aussi dû revenir sur des principes fondamentaux que je m’étais fixé … Souvent je regrette mais parfois c’est aussi ma seule solution pour ne pas m’effondrer …
    Courage ! Plus qu’une vingtaine d’années !!! Haha

    1. Urbanie

      C’est ce que je me dis aussi en ce qui concerne les nuits: plus que quelques mois (années?)! 😀

  4. Je suis totalement d’accord. Sous couvert de bienveillance on met une pression de dingues aux jeunes parents, qui n’osent plus se faire confiance et suivre leur instinct.
    C’est génial d’avoir de nouvelles connaissances sur le développement de l’enfant et d’en prendre compte, mais aucun parent ne peut être tout le temps calme, attentif, compréhensif. Et on a vite l’impression d’être un monstre alors qu’on est juste humain.
    Bon, après c’est à nous de savoir faire la part des choses, prendre ce qu’on veut sans se dire qu’il faut être parfaite tout le temps (et c’est bien le plus difficile).
    Des bises à Kate et toi.

    1. Urbanie

      Merci!
      Oui, complètement: à nous aussi de faire la part des choses. Mais j’avoue que, quand je lis un article qui dit en substance que tu « maltraites » ton bébé parce que tu fais tout « mal » (d’après les critères de la personne qui a rédigé l’article), je suis forcément un peu ébranlée ensuite, et en colère: de quel droit ces gens (souvent des jeunes parents) osent-ils être aussi péremptoires envers d’autres jeunes parents? J’essaie de leur trouver des excuses en me disant que, dans le fond, ils sont aussi paniqués que moi, et que se cacher derrière autant de certitudes doit certainement les rassurer, mais je trouve les accusations et les sous-entendus malgré tout terriblement violents.

  5. Weena

    J’aime beaucoup ton article, parce que finalement, le plus dur dans l’éducation des enfants, c’est de trouver le subtil équilibre entre les « il faut … », les nouvelles normes, et sa propre sensibilité (ou se qu’on est capable de faire) : le co-dodo me fait peur (mais, c’est ma peur à moi, pas celle de quelqu’un d’autre), pourtant, je me suis retrouvée à co-dodoter quasiment un mois à un moment où c’était le seul moyen pour que mon fils et moi (et mon mari aussi, un peu) puissions dormir et assurer la journée derrière.
    Et c’est pareil pour plein de chose …

    1. Urbanie

      Merci!
      Je suis comme toi: le cododo me faisait peur aussi, et puis… Kate a su me dire qu’elle en avait grand besoin. J’essaie, comme tu l’as fait, de trouver un équilibre entre ses besoins, mes besoins à moi, et mes croyances en matière d’éducation. Et c’est loin d’être facile tous les jours!

  6. Pititefleur

    N’ayant pas encore d’enfants mais me posant pas mal de question, je pense avoir quand meme des idées bien arrêtées sur la manière dont je souhaite en accord avec mon mari que nous eduquions nos enfants.
    Mais c’est vrai que systématiquement quand je dis quelque chose, on me reproche de ne pas pouvoir comprendre et que je verrais quand j’en aurais. Je suis d’accord sur le fait que nous ferons sans doute des choses différentes lorsque nous aurons vraiment un enfant à gérer. Mais je pense quand même que ces remarques manquent un peu de bienveillance au sens large.
    Coe tu l’écris si bien, je pense qu’il est important de faire ce que l’on estime bon et idéal pour son enfant, de demander des conseils quand le besoin s’en fait ressentir et d’oublier les « nous devons faire … » qui finalement ne servent qu’à culpabiliser des jeunes parents souvent un peu perdus au début qui essayent de faire du mieux qu’ils peuvent.

    1. Urbanie

      C’est la grande difficulté que rencontrent beaucoup de jeunes parents (ou de parents en devenir): demander et recevoir des conseils parfois assénés avec brutalité! Alors oui, en effet, la venue d’un bébé chamboule pas mal nos certitudes (avant Kate, je refusais tout cododo et je comptais arrêter l’allaitement rapidement). Mais rien n’empêche de se projeter en tant que parents avant l’arrivée concrète du bébé et de réfléchir à un « modèle » d’éducation. Du coup cela t’entraine pour plus tard! 😉

  7. Marie GdC

    Il est top ton article ! Il regroupe toutes les questions de pas mal de parents !

    Je ne pense pas que l’éducation bienveillante (Même si je lui préfère le terme positive car je ne connais aucun parent qui souhaiterait être malveillant avec son enfants) soit une norme ou en devienne une. Non, car le vrai but de l’éducation positive est de permettre à chacun de s’épanouir tout en respectant les besoins de chacun, donc comment s’épanouir quand il faut rentré dans un moule ?
    C’est relégué par beaucoup de média et site mais au final ils ne donnent qu’une parti du « truc » parce que choisir le chemin d’une éducation respective et positive pour ses enfants, c’est beaucoup plus que ça ! C’est accepter de se remettre en question, de remettre en question notre propre éducation et bien souvent cette société dans laquelle nous évoluons, un peu perdu, à la recherche de bonne norme à respecter.
    Quant aux « bons conseils » pas toujours lu ou dit de façon bienveillante, il me semble que cette fameuse culpabilité qui nous rabaisse y est pour quelques choses, non ?
    Je comprends ces femmes qui exultent dans leur chemin bienveillant, je comprends leur envie/besoin de conseiller… J’en ai fait parti 😉 On a l’impression d’avoir une clef magique que l’on voudrait partager mais l’autre, en face, ne comprend pas toujours nos mots…
    Donc l’éducation positive est pour moi un état d’esprit, une façon de vivre et elle ne peut en aucun être bénéfique à qui que se soit si elle est subit comme une norme.
    Au plaisir de te lire <3

    1. Urbanie

      Complètement d’accord avec ce que tu dis, y compris sur la culpabilité que nous ressentons toutes, j’ai l’impression. Effectivement, j’avais d’abord entendu parler d’éducation ou de parentalité positive, et puis « bienveillante »a fini par remplacer le terme dans les médias (je ne parle pas des blogs, où on peut toujours lire « positive » un peu partout). J’imagine que c’est plus « lisible », plus vendeur?

  8. Quatre enfants

    Je n’ai pas fait les mêmes choses avec mes 4 enfants. Je me suis adaptée en fonction de chacun. Pour le premier, j’ai eu tendance à chercher à savoir comment fait la voisine, pour être sûre d’être dans le « vrai », puis ensuite, je me suis vite rendue compte que c’est l’enfant qui nous nous fait prendre tel ou tel chemin. Cododo avec un, pas avec l’autre, allaitement avec l’un, pas avec l’autre, portage ou poussette … bref, je n’ai pas fait un choix précis sur la façon dont je voulais accompagner mes enfants, ce sont eux qui m’ont guidée. Et comme tu l’écris si bien, la bienveillance, c’est la base 🙂

    1. Urbanie

      Merci de ton témoignage! Je me demande souvent comment ce sera, avec un autre bébé: est-ce que si nous faisons un autre enfant, celui ci sera autant en demande? Ca me rassure, ce que tu racontes, cela veut dire que chaque bébé est une histoire différente.:)

  9. Veronique

    Hello

    Je voudrais juste apporter mon témoignage et quelques idées au débat.
    Je suis tombée dans la marmite de l’éducation positive/bienveillante il y a presque 7 ans à la naissance de mon aînée. Le déclic a été un bouquin offert par une copine. C’était la première fois que j’étais invitée à me poser des questions sur l’éducation que je voulais offrir à ma fille. Et c’est bouleversant.
    A l’époque, Isabelle Filliozat était plus discrète, elle ne passait pas tous les mois sur france Info/Inter.
    Du coup, ensuite, j’ai eu envie que tous les gens autour de moi se posent aussi des questions, comprennent que les neuro-sciences nous permettent d emieux comprendre ce dont a besoin un bébé/enfant, et…comprennent ma position.
    Quelle déception lorsque mes idées toutes belles, toutes neuves, bien réfléchies, ne sont pas accueillies avec l’enthousiasme attendu, voire dénigrées au plus vite.
    Je pense que nous sommes une nouvelle génération de parents, qui ne reproduit plus exactement ce qui nous vient de nos parents car nous on sait que nos enfants ne vivront pas du tout du tout ce que nous vivons : la preuve, à l’époque de mes parents, y avait pas de chômage et pas d’internet !
    Et tout rejeter en bloc ne marche pas non plus : les 68ards d’hier sont les retraités d’aujourd’hui, plus riches, plus puissants et en meilleure santé que jamais. Nous, on est plutôt la génération « crise de l’immobilier » et cop21…
    D’où les réflexions très intéressantes sur l’autorité, les limites, les frustrations etc.
    Alors oui, parfois les convictions d’écoute et de bienveillances se perdent dans des discours qui paraissent bien normatifs. C’est le revers de la médaille.
    Les réflexions autour de l’éducation bienveillante/positive sont riches et multiples. A nous de mieux comprendre, apprendre et convaincre, même les grands-parents d’ailleurs !

    1. Urbanie

      Je comprends cette envie de « bien faire » en parlant aux autres parents (ou aux proches) de ce que les dernières découvertes scientifiques nous ont appris sur les bébés, leurs besoins, et leur évolution. En effet, quand j’entends mon propre père me dire « laisse Kate pleurer, sinon tu vas en faire un tyran » alors qu’elle n’a que 3 mois, je frémis… comment en arrivons-nous à nous projeter de la sorte sur nos bébés? Comment arrivons-nous à en avoir peur à ce point?
      En revanche, si j’approuve le fond, je conteste la forme quand elle prend des allures de culpabilisation intensive: « si tu ne fais pas ça, alors… » Brrrr! Rien que d’entendre ça (ou de le lire), ça me met souvent hors de moi. Mais c’est là la limite de l’exercice: comment convaincre sans forcer? Comment accepter aussi que l’autre ne veuille pas entendre notre discours? Et puis, il faut aussi accepter que l’autre, même en écoutant, ne soit simplement pas d’accord… ce n’est pas facile, je te l’accorde! Cela signifie aussi savoir lâcher prise, malgré nos convictions les plus intimes.

      Je me retrouve confrontée à ça aussi, régulièrement, quand j’essaie de convaincre d’autres jeunes mamans de prendre leur vitamine B9: je suis passée par le deuil périnatal, je sais les bienfaits de cette vitamine, je sais aussi la souffrance du deuil. Pour autant, je suis aussi souvent forcée d’entendre des femmes me dire que « ça ne sert à rien ». Oui, ça me donne envie de me mettre en colère; mais j’essaie de relativiser, de me dire que la femme en face de moi n’aura pas ma malchance, et qu’elle fait aussi de son mieux pour la santé de son bébé, en fonction de ce qu’elle croit sincèrement être le mieux pour lui (et peut être dans 15 ans nous dira t-on que la vitamine B9 était en fait néfaste? Va savoir!). Bref, un pavé pour te dire que je comprends aussi ton point de vue. Mais que je déplore les tentatives de certains de forcer les autres parents, qui font déjà du mieux qu’ils peuvent!

  10. nurse mama

    Ton article fait résonance chez moi forcément. Maman d’un petit garçon de 3 ans que j’ai allaité 1 an, porté ( et encore maintenant ), qui cododote avec nous, j’attends mon deuxième bébé pour février. Les livres de Fillozat nous aident bien à affronter les tempêtes émotionnelles qui arrivent forcément et à trouver des réponses à nos questions. Forcément on se retrouve à lire des blogs, des articles en lien avec nos convictions et nos découvertes parentales qui nous surprennent car malheureusement en occident ces 50 dernières années la société nous a appris à nous éloigner de nos bébés… mais ça change, c’est bien et c’est bon pour ces petits adultes en devenir ( et pour nous aussi )

    belle journée à toi

    1. Urbanie

      Je suis d’accord avec toi: j’ai vraiment le sentiment que la société a « désappris » aux parents la proximité avec nos bébés, comme si c’était « mal » ou contre nature, c’est assez étrange quand même. Je ne suis pas non plus pour cet extrême là!
      J’aime bien les livres de Filliozat, je regrette simplement qu’elle cède elle aussi parfois à certains raccourcis qui sont un chouia moralisateurs. Ils m’apprennent beaucoup aussi, cependant, donc j’essaie de faire abstraction.

  11. Emma June

    Comme c’est vrai. Autant il y a des vérités prouvées scientifiquement (maturation du cerveau des enfants tout ça) autant, chaque enfant est tellement différent qu’un même comportement ne sera pas forcément adapté.

    Et cette bienveillance factice des parents qui se croient parfaits!
    Perso, j’ai même quitter un groupe FB sensé etre bienveillant car je me faisais limite insulter car je ne partageais pas leurs pratiques(allaitement par ex) Et donc? J’ai essayé de leur faire comprendre avant mon départ que la bienveillance commence dans l’exemple! mais pas sûr que ça ait marché.

    Je suis pour la bienveillance, j’ai beaucoup lu, j’essaie de faire au mieux mais non, je ne suis pas parfaite et je pense aussi que c’est une chance pour mon fils.

    Comme toi donc, d’accord sur le fond (en général) mais pas sur la forme.

  12. Louna

    Oooooooooooh ! Mais c’est de nous, dont tu parles ? Si c’est le cas, merci, et surtout, il n’y a pas de quoi ! Pour moi, c’est une telle richesse, tous ces échanges entre jeunes parents (plutôt avec des mamans, d’ailleurs, sur la toile, mais je me rattrape à la crèche où je glane des infos sur l’éducation et les problèmes rencontrés autant du côté des mamans que des papas !). Et j’aurais tant eu besoin de ce soutien l’année dernière, au moment où moi aussi je galérais avec les nuits de ma fille, et où je m’enfonçais doucement dans la dépression post-partum…. Alors, vraiment, continue à t’appuyer sur nous : on est là pour ça, pour accompagner et discuter, sans juger, sans comparer, juste pour s’enrichir mutuellement !

    Et je suis tellement d’accord avec toi sur le fond : cette nouvelle mode de la bienveillance a parfois trop tendance à devenir une norme, voire même un diktat qui fait plus de mal que de bien au parent (et soyons honnête, bien plus souvent à la maman qu’au papa, mais ceci est un autre débat !) et donc ne peut qu’être néfaste pour l’enfant également. Enfin, c’est ce que je pense : un enfant serein et épanoui commence par des parents heureux et pas trop stressés, qui se font confiance sur ce parcours chaotique. Quelle aventure difficile que de guider et accompagner cette toute petite personne !

    Comme toi également, je suis gênée par le ton souvent trop péremptoire des parents qui te conseillent tel ou tel comportement. Je suis du genre à me mettre tellement vite en question que j’en perds confiance en moi, et je n’ai pas l’impression que ça fasse du bien à ma petite fille.
    Tout comme toi également, je trouve beaucoup d’informations intéressantes et importantes dans les livres de Filliozat, mais je suis hérissée par les « il faut », « il ne faut pas » : à quand un peu de bienveillance pour les parents ? Qui est parfait tout le temps ?

    Bref, merci pour cet article qui résume tout à fait mon sentiment à ce sujet ! 🙂

    1. Urbanie

      Merci Louna! 🙂

      Oui, on est bien d’accord: c’est surtout la maman qui doit porter sur ses épaules cette pression incroyable… mais je pense que rien que cela mériterait un article entier sur le sujet!

      1. Louna

        Oh oui ! Mais j’ose pas trop me lancer : j’ai peur de ne pas être assez robuste pour lancer ce genre de sujet polémique !
        Et puis, moi qui prône l’égalité femme / homme dans tous les domaines, j’ai peur de me confronter à la dure réalité de ce que pense la majorité des gens.
        Bref, moi, peureuse et autruche ? je ne vois pas de quoi tu parles ! 😉

  13. Elfée

    Bonjour,
    Je lis ton blog depuis quelques temps, mais c’est mon premier commentaire.

    Je suis enseignante en College. Depuis 8 ans j’en ai vu des grands enfants! Tous différents. Tous ayant eu une Education sensiblement différente. Bien sûr j’en ai vu des enfants pénibles, qui ne respectent pas les regèles, Ni meme leurs parents. Mais J’ai bien du mal à trouver des points communs entre tous. Certains ont des parents géniaux qui désespèrent. Ils étaient présents pour leur enfant, ils les ont aimé, certains ont été sévères, d’autres à l’écoute.
    Bref, comme tu le dis, chaque enfant est different, chaque parent aussi, et j’ai adoré ton article! Je n’imagine pas qu’un parent veuille le pire pour son enfant.
    J’ai l’impression que depuis 50 ans on veut nous imposer des façons de penser, de faire (pour les enfants comme le reste!) Je ne suis pas sûre qu’avant cela il y avait des normes.
    Et si on laissait chacun faire au mieux, en suivant son instinct? En prenant ce qu’on veut à droite à gauche.

  14. Etoile

    Je n’avais pas encore lu cet article, et il fait du bien 🙂 Cette bienveillance, est de manière insidieuse, un peu tyrannique de mon point de vue ! Je trouve qu’il y a une pression énorme sur les jeunes parents pour que l’enfant devienne « normal », soit dans une norme finalement un peu imposée, non ? Entre les avis des uns et des autres, déjà on s’y perd, et cela nous amène à nous poser encore plus de question. Les conseils ne sont pas toujours objectifs, car ils partent des expériences de chacun. Hors chaque enfant est très différent, donc chaque parent va réagir en conséquence. Du moins, j’imagine. L’essentiel, n’est-ce pas d’aimer son enfant et de faire le maximum de telle manière que la famille soit heureuse, peu importe comme cela fonctionne ? Rien qu’en lisant cet article, je pense que ton petit koala a de la chance d’avoir une maman qui pense comme toi, et que tu fais preuve d’un super recul sur les choses, et ça, ça fait du bien 🙂 🙂

    1. Urbanie

      merci! 🙂
      Oui, je pense aussi que l’essentiel, c’est de faire de notre mieux (et c’est déjà très bien)!

  15. Ludivine

    Bonjour Urbanie,
    C’est la 1ère fois que je te lis et je trouve ta réflexion intéressante, car je suis moi-même blogueuse sur l’éducation « bienveillante ». Lorsque tu parles de culpabiliser les parents, je me demande parfois si les parents ne se sentent pas jugés, même si la personne qu’ils lisent est bienveillante. Ce que je veux dire, c’est que le sujet de la parentalité est extrêmement délicat, voire « touchy » parce que chaque parent (normalement constitué) fait ce qui lui semble le plus juste et fait de son mieux pour éduquer son enfant. Imaginons un parent qui frappe son enfant parce qu’il a été éduqué de cette façon. Pas besoin pour lui de se remettre en question, vu que c’est sa norme et il ne voit pas de problème. Si un jour, il découvre, sur un blog d’éducation bienveillante, que cela nuit à son enfant (comme c’est aujourd’hui prouvé par les neurosciences), il pourra se sentir jugé parce qu’il réalisera que sa méthode n’est pas correcte. C’est ce derrière quoi il se cachera s’il n’est pas prêt à l’entendre et à se remettre en question. De plus en plus, je suis convaincue que de remettre en cause la parentalité qu’on a choisie doit s’accompagner d’un cheminement personnel. Il faut une certaine ouverture pour accepter de passer d’une relation verticale à une relation horizontale avec son enfant. Et les conseils que l’on peut trouver sur la blogosphère peuvent très vite être mal perçus, j’ai l’impression. Après, la limite est fine entre les conseils et les « c’est comme ça, un point c’est tout ». En tout cas, merci pour ton partage. Je redoublerai d’effort pour être sûre que mes articles soient reçus avec bienveillance 🙂

Répondre à Emma June Annuler la réponse

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.