Je crois que j’ai besoin de me changer les idées par rapport à tout ce qui se passe en ce moment. J’ai une énorme gueule de bois, j’ai mal à ma ville. Je pourrais vous en parler, mais les mots ne sortent pas. Je tourne en boucle depuis bientôt 10 jours sur les chaines d’infos comme pour vérifier que tout ce cauchemar est bien réel. J’aimerais tellement aller me recueillir devant le Bataclan, mais je ne veux pas prendre le risque de mettre Kate en danger. Elle n’a pas 3 mois, je ne veux pas l’exposer à un mouvement de foule en cas de panique générale. Je crois que je suis, comme beaucoup d’entre vous, traumatisée par ce qui vient de nous arriver. Cela me semble tellement irréel de me faire fouiller et de devoir ouvrir mon manteau dans mon Séphora de quartier. Cela me semble tellement ridicule de voir ces décorations de Noel dans une ville où plus personne n’a le coeur de célébrer quoi que ce soit.
Oui, je sais: il faut célébrer la vie, il faut entrer en résistance, en trinquant aux terrasses de café, en continuant à rire et à aimer le plus fort possible. Mais, au risque de vous décevoir, j’ai plutôt la trouille. Etre devenu maman d’une merveilleuse petite fille n’y est pas étranger, c’est un fait. Mais ça me fait mal: mal de voir que ma ville adorée souffre autant. Mal de vérifier sur les listes de victimes publiées dans les journaux que je ne connaissais personne. Mal de demander à mes proches si « ça va », avec une conscience aiguë que la personne peut me répondre qu’elle connaissait quelqu’un qui y est resté. Mal de trembler à chaque sirène que j’entends au loin dan les rues. Moi qui habite près d’une caserne de pompiers, je peux vous dire que le son de leurs camions résonnaient amèrement le soir du 13 Novembre.
Je sais que Paris s’en remettra: ma ville de naissance, ma ville de coeur, est trop arrogante pour laisser une bande de fanatiques lui dicter sa conduite. Mais moi, je crois que je vais avoir besoin d’un peu plus de temps pour me remettre sur mes pieds. Et je crois qu’on est tous un peu dans ce cas-là: avec une sacrée gueule de bois qui nous empêche encore de nous remettre en route comme si de rien n’était. On va sans doute tituber encore un peu le long du chemin avant de reprendre le cours de nos vies.
Prenez soin de vous et de ceux que vous aimez, les amis.
Ce genre de moment nous bouleverse et nous fait revoir nos priorités. J’ai du mal à voir le sens des choses, et moi qui me pose souvent cette question du sens, forcément, tout ça me déboussole énormément.
Courage Urbanie. Prends soin de toi et des tiens, toi aussi. Entoure-toi des sourires de ceux que tu aimes, c’est le meilleur remède à ce genre de gueule de bois-là.