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Rebecca, de Daphné du Maurier: le roman d’une obsession

Je fais un court passage par ici pour vous parler d’un coup de coeur absolu, que je viens de dévorer en 3 jours: « Rebecca », de Daphné du Maurier. Il s’agit en fait pour moi d’une redécouverte, puisque ce roman fait partie de mes tous premiers coups de coeur littéraires. J’avais dévoré »Rebecca » adolescente, une gifle pour la gamine que j’étais. Je me souviens avoir lu et relu certains passages avec avidité, pour tenter d’en comprendre le sens caché, pour accéder à de nouvelles interprétations, avec à chaque fois l’impression de découvrir un texte nouveau. Ca tombe bien, le roman, paru en 1939, vient d’être rafraîchi par une nouvelle traduction française (la précédente pêchait malheureusement par quelques coupes – la censure de l’époque étant passée par là) (oui, il y’a du sexe dans « Rebecca ») (avouez que maintenant je vous intéresse ^^).

 

« Rebecca », donc, ça parle de quoi? Pour faire court, nous sommes dans les années 30. La narratrice est une jeune potiche inexpérimentée de 21 ans qui sert de demoiselle de compagnie à une sacrée mégère; en vacances à Monte Carlo, elle fait la connaissance de Maxim de Winter, veuf de 42 ans, riche et plutôt bourru (mais il est riche, donc ça aide).  Nos deux protagonistes se lient, si bien qu’en 2 semaines et quelques balades en voiture dans la pampa, Maxim de Winter demande la jeune gourgandine en mariage (on faisait moins de chichis, dans le temps) et la ramène à Manderley, sa splendide propriété située en Angleterre.

Oui, mais voilà: Rebecca, la défunte épouse, a beau être morte, Rebecca est encore partout. Dans les souvenirs des visiteurs qui présentent leurs hommages à la nouvelle Madame de Winter, dans le regard des domestiques de la maison, dans chaque bibelot qu’elle avait choisi avec soin, chaque morceau de tissu qui porte encore son parfum. Sur le papier, Rebecca avait en effet tout pour elle: incroyablement belle, éduquée, intelligente, raffinée, populaire. Le genre de femme Barbara Gould qu’on oublie pas. Difficile pour notre narratrice (qui possède le self-esteem d’un bulot) de s’imposer dans une Manderley hantée par la présence de la défunte. La nouvelle Madame de Winter doit également composer avec la terrifiante Madame Danvers, gouvernante des lieux, qui vouait un culte presque obscène à Rebecca…

 

Si vous avez peur de vous retrouver avec un roman à l’eau de rose, n’ayez crainte: « Rebecca » se rapproche plus d’un polar que d’un roman Harlequin (mais je ne vous en dirai pas plus, histoire de garder le suspense parfaitement intact).

Niveau ambiance, on est dans l’univers du roman gothique, les descriptions de Manderley rappelant les soeurs Bronté, les landes battues par le vent, la violence impitoyable de la nature (Rebecca n’est-elle pas morte noyée?). Manderley est d’ailleurs, à plus d’un titre, le personnage principal du roman: domaine célèbre pour son faste et fantasmé par tous, indissociable de la défunte épouse qui le régissait d’une main de maitre, et qui deviendra la prison dorée de la narratrice, incapable de prendre tout à fait possession des lieux.

 

Ce qui me fascine dans ce roman, c’est l’analyse de la psychologie des personnages, d’une justesse et d’une modernité incroyables. « Rebecca » est en effet un superbe roman sur l’obsession de la jalousie. Le roman est livré du point de vue de la narratrice, submergée par la jalousie envers celle dont elle n’arrive pas à prendre la place (nous ne connaitrons d’ailleurs jamais le prénom de celle qui nous conte l’histoire!). Les faits rapportés sont-ils pour autant exacts? Ne livre t-elle pas au lecteur un récit des événements biaisé par sa propre imagination, par ces projections folles qu’elle invente sans cesse et en toutes circonstances? Rebecca ne serait pas si obsédante sans les fantasmes nourris de la nouvelle épouse à son égard.

Les amateurs de Psychologies Magazine trouveront également dans le roman un personnage digne des plus grands pervers narcissiques de la littérature…

 

Je m’arrête là parce que sinon, je crois que je pourrais continuer pendant des heures. Mais voilà: si vous ne connaissez pas ce roman, foncez sur sa nouvelle traduction. Vos 25 euros seront plus que rentabilisés. Ne serait-ce que parce que vous aurez, vous aussi, besoin de lire et de relire ce roman truffé d’ambiguïtés et de double-sens.

 

Cet article a 13 commentaires

  1. Tannabelle

    Tu m’as donné terriblement envie ! Il va bientôt rejoindre ma pile de bouquins en attente ! 🙂

  2. Mrs Smith

    Dis donc ça c’est de la critique alléchante, je m’en vais trouver un exemplaire de ce pas! 🙂

    1. Urbanie

      Tu me diras ce que tu en as pensé! 🙂

  3. Pititefleur

    Ça a l’air sympa ! Me reste plus qu’à le trouver en ebook !

  4. Fleur

    Pour moi aussi ce fut un sacré coup de coeur ! Ce roman m’a donné très envie d’en lire d’autres de Daphné du Maurier (que je ne connaissais pas jusque-là).

    1. Urbanie

      Idem, mais je ne sais pas par lequel commencer!

  5. ifeelblue

    c’est un de mes livres préférés! et un de mes auteurs préférés 🙂 je te recommande Ma cousine Rachel, que j’ai dévoré également 😉

    1. Urbanie

      Ah merci du conseil! 🙂

  6. missycornish

    Je vois que je ne suis pas la seule fervente admiratrice de Rebecca. Je viens aussi d’acheter le livre aujourd’hui étant actuellement plongée dans La biographie de Tatiana de Rosnay. Passionnant! En bref, je me régale! Ce n’est pas non plus La première fois que je lis Rebecca.

  7. Azalée

    Bonjour
    Je suis également à la moitié du livre.
    C’est un peu honteuse et stupéfaite que je dois admettre ne pas avoir remarqué le fait que la narratrice n’est jamais nommée. Mais vous avez raison et vous remercie pour cette éclaircissement.
    En tous les cas je suis assez étonnée du pouvoir d’attraction que ce livre exerce sur moi. Car elle n’utilise pas certaines techniques littéraires bien connue pour tenir en haleine son lecteur comme par exemple le changement de narrateur d’un chapitre à l’autre qui évite qu’on puisse se lasser. Il n’y a pas d’actions explosives mais la vie de cette jeune fille bien que « godiche » à quelque chose de touchant et qu’on a sans doute était un peu avant d’être gagné par l’expérience mais un peu plus tôt qu’elle 😉 En même temps elle est pleine de lucidité sur sa société ce qui est quand même une marque de maturité.
    Par contre, j’ai hâte de lire des passages plus charnelles car je me faisais justement hier soir la réflexion que c’est absolument absent et cela me semble une lacune dans l’approche de cette jeune fille inexpérimentée auprès d’un homme de 20 ans son aîné.
    Je suis venue à cet auteur également par Tatiana de R. dont je raffole également le style. Cette façon de décrire les lieux me touche et m’aide à profiter du moment présent.
    Je vais également tenter « ma cousine Rachel »
    Bonne continuation dans votre blog
    A l’occasion pourquoi ce nom « la marmotteuse » si je peux me permettre ?

    1. Urbanie

      Bonjour Azalée,

      Je suis bien d’accord, ce livre a un réel pouvoir de fascination… il est d’une grande cruauté envers sa narratrice, cela y participe très certainement. Il n’ya pas vraiment de scènes « charnelles », il y’a des suggestions, en particulier sur le personnage de Rebecca. C’est ce qui participe à la tension de l’intrigue, on en dévoile très peu, mais j’avais trouvé que le peu qui était suggéré contribuait à rendre le personnage de Rebecca particulièrement machiavélique.

  8. delphine

    Coucou, j’ai moi aussi la nouvelle traduction de Rebecca avec la même image dde couverture que toi , mais je ne comprend pas j’ai beau relire plusieurs je ne trouve pas de trace de « sexe » dans le lire, j’ai peut être mal lue.

    En se qui consterne Mme Danvers, on voit bien sa passion quand elle parle de Rebecca tout les petit d’étaille de sa vie, les objet à leur place au centimètre près, que c’était elle seule qui rentré dans la chambre personne d’autre « sa voix basse et intime »,. j’ai l’impression qu’il y avait une forme d’amour

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